La dépression Kirk perturbe toujours Crécy-la-Chapelle. En Seine-et-Marne, plus de 140 communes ont été touchées. Les collectivités situées près du Petit Morin ou du Grand Morin ont particulièrement souffert. Routes bloquées, habitants délogés et rues détruites… A Crécy-la-Chapelle, rien ne pouvait préparer les riverains à une telle tempête. Quelques jours plus tard, la commune est toujours marquée par son passage. Pour reconstruire le cadre de vie créçois, un seul mot d’ordre : la solidarité.

Le traumatisme de 2016 refait surface. Dans la Communauté d’Agglomération, une commune est régulièrement sujette aux inondations : Crécy-la-Chapelle. Malgré l’expérience des riverains et des élus, le passage de la tempête Kirk reste historique. « Nous sommes à la quatrième inondation, c’est la plus catastrophique… Du jamais vu ! J’ai des personnes âgées qui n’ont pas souvenir de ça… On m’évoque la date de 1910, on ira voir dans les archives quand on aura un peu plus de temps. Aujourd’hui, c’est la plus grande inondation avec des hauteurs d’1m50 et une violence de l’eau… Le constat est désastreux au niveau du centre-bourg, mais également en périphérie de Crécy. » Et pourtant, très rapidement, le Plan de sauvegarde communal avait été déclenché. A l’annonce des pluies violentes, les services ont distribué des parpaings et ils ont même aidé les habitants à monter leurs meubles. « Quinze jours avant, on avait déjà eu des inondations. L’eau n’était pas arrivée jusqu’à la Place Altmann. Là, tout le centre-bourg et les rues environnantes ont été inondés. On ne veut jamais croire au pire ! » Logements décimés, commerces balayés et rues abîmées… Encore une fois, les Créçois n’ont pas été épargnés.

Christine Autenzio, Maire de Crécy-la-Chapelle, est au micro de Crazy Radio

Crécy, une zone sensible. Après avoir séché leurs larmes, les riverains ont tous retroussé leurs manches. Depuis plusieurs jours, ils s’activent pour reconstruire la ville (et leur vie), sous les yeux du maire : Christine Autenzio. « Le constat, je le qualifierai de désastreux… C’est un impact énorme sur le commerce et la vie économique. Pour certains commerces, il est prévu qu’ils ferment pendant six mois. Les gens… Pour certains, ils sont abattus mais ils se disent qu’il faut qu’ils fassent quelque chose. Il y a quand même une énergie. » A l’heure actuelle, les dégâts sont estimés entre cinq et six millions d’euros. « 84 commerces ont été inondés, 76 sont encore fermés, tout en sachant qu’on a une centaine de commerçants installés sur la commune. On a 4 200m² de travaux à envisager, en fonction des commerces inondés. » Plus d’une centaine d’emplois à préserver ! Cette semaine, une trentaine de commerces devraient rouvrir leurs portes. Pour aider les sinistrés, une permanence avec la CCI (et les différents organismes comme l’URSSAF) a été mise en place. « Là, il y a des démarches administratives à faire. Il faut soulager nos commerçants parce qu’une boîte vocale à distance, ce n’est pas possible. Ils ont une personne humaine à l’écoute et dans le conseil. Lundi, on a déclenché la cellule d’urgence médico-psychologique parce qu’on le sait, ça aura un impact. On peut la faire venir, je pense que l’après-coup se fera. Je le sens déjà pour certains. » nous confie le maire.

« On se retrousse les manches et on travaille ensemble, c’est mon mot d’ordre ! »

Les habitants délogés, un cauchemar. Suite au passage de la tempête Kirk, de nombreux Créçois ont perdu leurs logements. Dans la rue, des meubles brisés se mêlent aux souvenirs détruits… Une longue reconstruction qui commence ! « On parle des commerçants mais il y a aussi les sinistrés. Quand l’eau est partie… J’ai souhaité que la ville soit nettoyée le plus vite possible pour qu’on ait une autre image de Crécy-la-Chapelle. Les balayeuses sont rentrées en jeu, on a eu de l’aide… Je remercie les institutions autour : la Communauté d’Agglomération, le département et mes collègues maires qui ont proposé leur aide. » Très rapidement, la commune a recensé les gîtes, les hôtels et les campings à proximité pour reloger les sinistrés. Certains vivent toujours chez leurs voisins. Une situation plus pérenne est étudiée pour permettre aux enfants de retrouver les bancs de l’école et attendre le début et la fin des travaux dans les logements impactés.

Christine Autenzio, Maire de Crécy-la-Chapelle, est au micro de Crazy Radio

Les commerçants ne peuvent pas tous rouvrir. Pourquoi ? En passant dans la commune, le constat est frappant. Si certaines boutiques ont retrouvé leur public, certaines sont toujours fermées. En cause ? La récurrence des inondations. « Il y a une imprégnation d’humidité dans les murs, on le voit. Les assurances ont précisé aux sinistrés qu’avant les travaux, il va falloir sécher. Dans la mesure où les murs ne sont pas secs, on ne peut pas engager des travaux de réhabilitation. Sur les précédentes inondations, peut-être que le séchage n’a pas été fait. Les murs étaient déjà humides… Cette inondation, elle est fatale. On a des pans de murs qui tombent… On a une odeur de champignons dans les locaux. » Les commerçants les plus touchés devront respecter un temps de séchage de plus d’un mois avant de pouvoir lancer les travaux. Malheureusement, ils auront probablement tous des besoins similaires, en même temps. Par rapport à la demande, les plannings seront surchargés.

2024, une année dévastatrice. Après avoir vécu les crues de 2016, Frédérique Tilly pensait avoir vu le pire… Après avoir veillé sur son atelier-boutique pendant plusieurs jours, l’artisan d’art n’a pas eu d’autre choix que de le quitter. A son retour, tout avait changé. « Je me suis sentie submergée, vraiment dans les deux sens du terme… C’est la troisième vraie inondation de l’année mais c’est la quatrième alerte. Au mois d’août, on a aussi été en alerte orange, il a fallu tout mettre hors d’eau. Là, c’était pire que tout… Aucune alerte n’aurait pu imaginer que les eaux puissent monter aussi haut et aussi vite. Comment je me sens ? Désemparée, démunie, perdue. » A Crécy-la-Chapelle, les commerçants du centre-bourg se serrent les coudes. Après avoir nettoyé chez l’un, ils s’attaquent tous à une autre enseigne. La solidarité avant tout ! « On ne sait pas par où commencer… On commence partout en même temps. » Épaulés par l’énergie des nouveaux commerçants (et leur ténacité), les plus anciens retroussent leurs manches. Une dynamique à la créçoise !

Frédérique Tilly, artisan d’art à Crécy, est au micro de Crazy Radio

L’avant-après Kirk, un désastre. Dans l’atelier de Frédérique Tilly, l’eau est montée très haut… « On a tous mis nos affaires hors d’eau pour une inondation à 50/60cm. Moi personnellement, ayant vécu 2016, j’avais mis mes affaires à plus de 70cm mais comme j’ai eu 1m10 d’eau… ça servait à rien. » Après avoir passé quelques heures sans électricité (ou chauffage), Frédérique a dû se résoudre à quitter son atelier. « J’ai retrouvé un lieu qui n’était pas à moi, il ne me ressemblait plus, il puait avec des affaires qui flottaient… jusqu’à mon établi qui doit peser plus de 150kg. J’avais des packs d’eau qui ont changé de pièce… » Déserte, la commune se reconstruit au fil des jours. Dans les commerces, certains se retrouvent autour d’un café pour échanger (et repartir plus fort). « Une fatigue qui vire à la colère… Une hypersensibilité à la moindre goutte d’eau du ciel. Aujourd’hui, c’est un peu l’angoisse. Il y a l’étape du nettoyage, il y a l’étape du séchage, il y a eu l’étape du tri. On jette une partie de notre vie… La prochaine étape, c’est de fabriquer quelque chose de beau pour retrouver Crécy, mieux qu’avant. » nous souffle l’artisan.

« Il faut qu’il se lance dans une campagne de réparation de la France ! »

Les attentes des riverains et des commerçants. Les images ont fait le tour de la France… Cette fois encore, Crécy-la-Chapelle n’a pas échappé à sa réputation de Venise briarde. Complètement sous l’eau, la commune a attiré la visite de nombreuses caméras de télévision, accompagnées par des personnalités politiques. « On aimerait que les politiques arrêtent de nous dire qu’ils réfléchissent et qu’ils fassent comme nous en situation d’urgence. On retrousse nos manches et on fait ce qu’il faut pour que la machine recommence à fonctionner. Les politiques doivent prendre des mesures en quelques jours, on veut bien leur accorder quelques semaines pour entretenir nos rivières (envoyer le Limon aux agriculteurs et construire des bassins de rétention). » Une politique politicienne qui épuise les riverains… Un ras-le-bol entendu par Christine Autenzio. « C’est la France… Il faut un accident pour qu’on aménage nos routes et qu’on change nos panneaux de signalisation. Aujourd’hui, il y a une inondation très grave à Crécy-la-Chapelle, je sens que nos représentants sont mobilisés. Je fais appel à eux ! Il faut qu’on soit dans la prévention des inondations, on est dans un changement climatique, c’est certain… Maintenant, il va falloir qu’on travaille ensemble ! » Le SMAGE, la Communauté d’Agglomération, la commune et les agriculteurs… Tous les services doivent se mobiliser. Les élus y seront vigilants.

Lors du dernier Conseil Municipal, la commune de Crécy-la-Chapelle a voté une aide exceptionnelle de 10 000 euros au CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) pour aider les sinistrés. Une première étape pour reconstruire le cadre de vie créçois qui fait toute sa splendeur.