La dépression Kirk perturbe toujours les sinistrés. En Seine-et-Marne, plus de 140 communes ont été touchées. Les collectivités situées près du Petit Morin ou du Grand Morin ont particulièrement souffert. Routes bloquées, habitants délogés et rues détruites… A Condé-Sainte-Libiaire, rien ne pouvait préparer les riverains à une telle tempête. Quelques jours plus tard, la commune est toujours marquée par son passage. Pour reconstruire le cadre de vie condéen, un seul mot d’ordre : l’entraide.

Le traumatisme de 2016 refait surface. Dans la Communauté d’Agglomération, une commune est régulièrement sujette aux inondations : Condé-Sainte-Libiaire. Malgré l’expérience des riverains et des élus, le passage de la tempête Kirk reste historique. « C’est la quatrième fois cette année, ça fait beaucoup… Et à chaque fois, c’est de plus en plus haut. Là, on a atteint des records… On a eu 30 centimètres d’eau de plus que l’inondation la plus haute qu’on ait connu en 2016. On a eu 30 centimètres d’eau dans les écoles alors que d’habitude, on a rien du tout. J’ai des travaux gigantesques à mettre en place dans les écoles. » Inaugurée en septembre dernier, l’école élémentaire Thomas Pesquet a été fortement touchée. Les travaux sont estimés à 100 000 euros. « Mon budget ne me le permet pas, on est en train de voir ce qui est possible avec les assurances… ça promet un avenir pas très brillant. » En interne, cette inondation a été rude… « Très compliqué à gérer, on a dû évacuer près de 70 personnes sur la commune. Et ça a été fait dans un temps record, ça a mobilisé beaucoup de nos élus, mais aussi de services comme les pompiers. Heureusement qu’ils étaient là ! » Logements décimés et rues abîmées… Encore une fois, les Condéens n’ont pas été épargnés.

Fabrice Marcilly, Maire de Condé-Sainte-Libiaire, est au micro de Crazy Radio

Condé-Sainte-Libiaire, une zone sensible. Avec l’instauration de la Taxe GEMAPI (gestion des eaux et prévention des inondations) et ses travaux fléchés, les riverains étaient presque soulagés. L’arrivée de la tempête Kirk a tout balayé sur son passage… Les pieds dans l’eau, les élus ne pouvaient même pas se fier au système défaillant de Vigicrues. « On travaille au doigt mouillé. La sonde qui est censée indiquer la hauteur du Grand Morin, elle est sur la Marne. Les côtes qu’on nous annoncent sont erronées et on ne sait pas à quelle hauteur doit monter le Grand Morin. On ne sait jamais à quelle hauteur, ça va monter… Les personnes qui gèrent Vigicrues nous donnent des indications qui ne sont pas bonnes ! Elles ne sont pas affinées. » Parfois, il y a un mètre de différence entre le terrain et les recommandations de Vigicrues. Des annonces qui ne préparent pas les riverains au pire ! « On se sent seuls. Après, j’ai la chance d’avoir une équipe incroyable avec moi… Ils réagissent au quart de tour et heureusement qu’ils sont là. » Tous les jours, les équipes se rassemblaient chez une élue qui n’était pas touchée par les inondations pour informer et accompagner les Condéens. Un bel esprit d’équipe !

Les habitants délogés, un cauchemar. Suite au passage de la tempête Kirk, de nombreux Condéens ont perdu leurs logements. Dans la rue, des meubles brisés se mêlent aux souvenirs détruits… Une longue reconstruction qui commence ! « L’eau est partie extrêmement vite. Sur Condé, ça prend généralement une semaine pour que l’eau s’évacue… Là, il n’y avait plus rien en une semaine. Ce qui est incroyable, c’est qu’il y a une solidarité, c’est l’ADN de notre commune. Le dimanche, on a eu la chance d’avoir soixante-dix bénévoles qui ont nettoyé les écoles et les rues. Franchement, ça fait du bien ! On se dit qu’il y a une part d’humanité. » Si le feu peut-être arrêté… L’eau reste imprévisible, elle balaye tout sur son passage (même nos beaux souvenirs). Un véritable traumatisme pour les riverains touchés. « J’ai des personnes sur la commune… Leurs maisons, c’est devenu un vrai taudis. L’équipe municipale est allée chez ses personnes-là pour nettoyer ou apporter leur aide… C’est limite insalubre. » Avant, pendant et après… Fabrice Marcilly et son équipe se mobilisent à tout instant. « C’est la première fois que je mets une cellule psychologique en place. On a vraiment vu des personnes traumatisées, même moi, il m’arrive de faire des cauchemars la nuit. » Une seule et même crainte : la pluie qui tombe.

Fabrice Marcilly, Maire de Condé-Sainte-Libiaire, est au micro de Crazy Radio

La tempête Kirk aurait pû faire encore plus de dégâts. Pourquoi ? Depuis quelques années, la municipalité de Condé-Sainte-Libiaire agit pour anticiper les inondations. « On a gardé la compétence eau et assainissement sur la commune, c’est ce qui a permis de mettre en place : des bassins de rétention. Pour le moment, on en a cinq. On en a encore deux à venir, ça va faire sept bassins sur la commune. Lorsqu’on a des tempêtes comme Kirk, ça permet de sauver des habitations… Mais, je récupère l’eau des communes en amont. Et ça malheureusement, je ne peux pas le gérer. » Aujourd’hui, c’est une prise de conscience générale qui est attendue par les Condéens et son maire, Fabrice Marcilly. « Dans l’urgence, on peut déjà nettoyer le Grand Morin (au niveau du fond), on peut gagner quelques centimètres. C’est ce qu’il y aura de moins dans les maisons. C’est des choses simples ! A côté de Condé, on a la branche alimentaire du canal de Chalifert, qui est là depuis 1840. C’est un énorme bras qui alimente le canal, il est rempli de branches d’arbres et de détritus… On peut le nettoyer ! » Un bassin naturel qui pourrait sauver des habitations… et nous faire gagner quelques centimètres. « Ensuite, il faut travailler sur le fond avec le SMAGE et les ingénieurs pour mettre des bassins de rétention sur chaque commune qui longe le Grand Morin. » Des études sur le long terme qui sont attendues par tous… Un collectif réunissant toutes les collectivités et riverains touchés a même été créé.

Les attentes des riverains et des élus. Les images ont fait le tour de la France… Cette fois encore, Condé-Sainte-Libiaire n’a pas échappé à sa réputation. Complètement sous l’eau, la commune a attiré la visite de nombreuses caméras de télévision, accompagnées par des personnalités politiques. « On nous a promis des choses, des sommes d’argent pour les sinistrés… Et puis finalement, on reçoit un petit mail en nous disant qu’il n’y aura rien. » Un mail qui renvoie même sur le site de l’institution en question, recensant plus de deux cents aides. « Ils n’ont pas besoin de remplir un dossier pour pouvoir éventuellement toucher une somme d’argent dans six mois ou un an… Ils en ont besoin tout de suite ! J’ai des personnes qui n’ont plus de frigos ou carrément plus de maisons… On est obligés de les reloger, c’est maintenant qu’il faut les aider. » Enfilez les bottes pour une photo devant les caméras, ça ne suffit plus. « Quand on est tranquille chez soi, dans son petit canapé à regarder la télévision… On n’a pas les mêmes visions des choses. Il faut le vivre pour comprendre et traiter l’urgence de ces personnes-là. » souligne Fabrice Marcilly.

A l’heure actuelle, une poignée de Condéens sont toujours éloignés de leur domicile, jugé trop insalubre. En mairie, les élus se démènent avec les assurances ou leurs propres moyens pour les aider. Une aide au cas par cas qui préserve ce bel esprit Condéen !