La dépression Kirk perturbe toujours les sinistrés touchés. En Seine-et-Marne, plus d’une centaine de communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle. Les collectivités situées près du Petit Morin ou du Grand Morin ont particulièrement souffert. Routes bloquées, habitants délogés et rues détruites… Rien ne pouvait préparer les riverains à une telle tempête. En Marne et Gondoire, c’est une politique d’anticipation qui a préservé les riverains. Explications.
Comment la tempête Kirk a-t-elle été gérée par les services de Marne et Gondoire ? Dans la nuit du 9 au 10 octobre 2024, les équipes de la Communauté d’Agglomération se sont précipitées sur le terrain. Pourquoi ? Observer les différents cours d’eau. « En réalité, il y a eu deux évènements. Il y a eu de grosses pluies d’un coup (mercredi), on a eu le droit à des inondations de ruissellements. Sur Marne et Gondoire, on a réussi à juguler ce ruissellement par des bassins de rétention que nous avions installés. On avait aussi nettoyé pas mal de bassins pour éviter la sédimentation, on a regagné du volume pour que l’eau vienne tempérer ici avant de se relâcher dans les milieux naturels. » Grâce à ces différentes précautions, de nombreuses habitations ont été préservées. « Ensuite, il y a eu la remontée de la Marne sur Marne et Gondoire, elle a surtout concernée la ville de Lagny-sur-Marne. On est monté à une hauteur classique… La situation était contrôlée parce qu’on a investi beaucoup d’argent. On a encore beaucoup de choses à faire, c’est pour ça que nos camarades sont allés sur le terrain pour prendre des vidéos. » Pendant plusieurs heures, les services se sont relayés pour prendre de précieuses notes. Des données qui permettront de flécher de prochains travaux… et d’anticiper d’éventuelles problématiques. Une politique du collectif qui a préservé toute la Communauté d’Agglomération !
La compétence de la GEMAPI ? Une opportunité qu’il fallait saisir ! Dans cette dynamique du vivre-ensemble (et donc du faire-ensemble), les élus de Marne et Gondoire ont choisi de transmettre cette compétence à la Communauté d’Agglomération pour avoir une vision d’ensemble. « Quand on a eu la GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), les élus nous ont dit qu’on avait tout le cycle de l’eau : de l’eau potable jusqu’à son passage chez les habitants (nettoyé puis remise en milieu naturel). » Une logique implacable au service des riverains. Individuellement, certaines communes n’ont pas les moyens de programmer de lourds travaux (trop coûteux). « Tous les ans, on dépense beaucoup beaucoup d’argent sur le cycle de l’eau global, on est quand même à un peu plus de 10 millions d’euros. Il y a un vrai investissement. L’objectif, c’est que les habitants ne soient pas embêtés. La plus belle réussite pour nous, c’est qu’on ait pas eu les télévisions qui soient venues. » Une bonne gestion saluée par de nombreux habitants. « Chaque inondation est compliquée. Là, il y a des gens qui sont dans de vraies situations très très difficiles qui auraient pu être évitées… Ce qui est important, c’est d’apprendre de ce qui s’est passé pour éviter que ça se reproduise. Il faudra dire à certains habitants que certains logements peuvent plus être habitables. Nous, on a identifié des logements qui commencent à devenir compliqués. A un moment, peut-être que l’État devra créer un fonds pour racheter ses bâtiments là. » Très bientôt, les assureurs pourraient ne plus suivre… Une situation dramatique.
« On n’a pas voulu prendre trop d’argent dès le départ parce qu’on ne savait pas le dépenser. L’impôt, il doit être utile ! »
La GEMAPI, c’est quoi ? Délégué par l’Etat, cette compétence est glissée dans votre taxe foncière, selon votre territoire. A son instauration, la Communauté d’Agglomération a rapidement agit. « C’est plus intelligent que ce soit les territoires qui le fassent, plutôt que des gens plus éloignés. Dès le départ, on s’est dit qu’il fallait qu’on prenne en compte cette compétence (la taxe GEMAPI) pour pouvoir finir de travailler sur le cycle de l’eau. Au départ, on a prélevé une somme dérisoire pour pouvoir faire des études (un euro symbolique). On est allé voir où il fallait qu’on travaille. Une fois qu’on a fait notre plan pluriannuel d’investissement sur les milieux aquatiques, on a demandé une part plus importante. » Tous les ans, Marne et Gondoire lève 3 millions d’euros pour aménager son territoire (dans le cadre de cette compétence). Qu’est-ce qui a été fait ? Dans un premier temps, les bassins ont tous été nettoyés, pour éviter à certaines communes d’être inondées. Dans un autre temps, la Communauté d’Agglomération a lancé de plus grands travaux. « Les priorités étaient multiples, il fallait désartificialiser certains cours d’eau (comme à Montévrain). Les habitants n’ont pas été inondés par les inondations liées au ru du Bicheret. C’est plutôt une bonne réussite de notre part. Si les travaux n’avaient pas été faits, ça aurait pu être une vraie catastrophe dans ce secteur là. » En même temps, les services surveillent régulièrement les bassins de rétention pour voir s’il faut les agrandir ou les récurer (pour gagner du volume). « On a fait des études. Il y a des bassins qu’on doit agrandir, ils vont être agrandis. On a fait beaucoup de travail. » Pour anticiper au mieux, les élus s’appuient sur la connaissance des agriculteurs. Pour stocker l’eau en amont, certains champs pourraient accueillir un petit fossé (avec des haies pour filtrer l’eau). « Notre rôle, c’est aussi de voir avec l’agriculteur comment on peut récupérer un bout de terrain. » Objectif ? Diriger les cours d’eau vers des milieux naturels (et non à proximité des maisons).
Comment les territoires peuvent-ils faire face aux enjeux de demain ? A l’origine, la taxe de la GEMAPI devait être temporaire… Aujourd’hui, les collectivités doivent faire face à de nouveaux défis. Pour préserver ses riverains, les élus devraient continuer à s’appuyer sur cette compétence. « La GEMAPI, elle ne résout pas tout. Elle va tout résoudre sur le long terme. Le changement climatique va encore durer des années. Il y a un plan national d’adaptation au changement climatique qui prévoit qu’on monte jusqu’à plus de 4°C en France… Il va falloir qu’on continue à s’adapter au quotidien. » Pour faire face à ces changements, les collectivités continueront à prévoir des travaux d’ampleur. « On va continuer longuement à la prélever parce qu’il va falloir continuer à changer. Il va pleuvoir plus à certains moments, moins à d’autres… Nos territoires doivent s’adapter. On va travailler, ça va durer des années. » En Marne et Gondoire, les élus continueront à lever 3 millions d’euros pour construire de nouveaux bassins, aménager son territoire et curer les bassins pour éviter des drames. « GEMAPI rapporte 3 millions d’euros à l’agglomération pour pouvoir faire des travaux. On en dépense 5 ! On prend l’argent ailleurs. Il vaut mieux gérer un problème quand il naît que quand il faut en gérer les conséquences. C’est facile de pleurer avec l’argent. L’important, c’est d’agir ! Le changement climatique est une réalité. » assure Pierre Tebaldini.
« On anticipe, on regarde comment on peut apporter des solutions avant que le problème n’arrive. C’est ça qui est intéressant. » En Marne et Gondoire, c’est une politique collective d’anticipation qui a permis de sauver des habitations, grâce à la compétence de la GEMAPI. Des aménagements qui ont même fait le bonheur de notre biodiversité (avec sa faune et sa flore) ! En Seine-et-Marne, plus d’une centaine de communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle.